Toulon, terrain de jeu et moteur économique : Le vrai bilan des grands tournois sportifs

13 octobre 2025

cofstoulon.fr

Entre passions et profits : Toulon au rythme des compétitions

Impossible de se promener à Toulon sans croiser un drapeau du RCT ou sentir l’effervescence des jours de match. Mais au-delà de la ferveur, quelle vraie dynamique ces grands tournois injectent-ils dans la ville ? Derrière les gestes techniques, c’est tout un territoire qui vibre, entre retombées sonnantes et trébuchantes et rayonnement touristique. Plongée dans les coulisses économiques et sociales d’une ville à qui le sport va si bien.

Un calendrier chargé : quand Toulon devient capitale sportive

Le nom de Toulon évoque spontanément le rugby, et pour cause : le Stade Mayol n’est pas qu’un sanctuaire pour les supporters du RCT ; il accueille chaque année certains des plus grands matches du Top 14 et des compétitions internationales prestigieuses. Mais ce n’est pas tout : citons le Tournoi Maurice Revello (ex-Tournoi de Toulon), référence mondiale des moins de 21 ans en football depuis 1967, ou encore les étapes du Tour de France (en 2023 sur le Mont Faron).

  • Stade Mayol : Capacité de 18 200 places
  • Tournoi Maurice Revello : 16 nations accueillies en 2022, dont le Brésil, la France et le Mexique (source : site officiel)
  • Événements nautiques : Coupe de France de voile, régates internationales à la base nautique du Mourillon

Ces événements ne font pas que remplir les agendas : ils boostent le tissu local, attirent médias, sponsors et surtout visiteurs de tous horizons.

Des chiffres qui parlent : l’impact économique pour les acteurs locaux

Un événement sportif, ce sont des places vendues, des hôtels pleins, des restaurants pris d'assaut, des transports en ébullition. Mais quelle est la réalité derrière la carte postale ?

Noir sur blanc : le poids estimé des grands tournois

  • Le RCT à domicile : Selon la Chambre de Commerce et d’Industrie du Var, un match à guichets fermés génère de 1 à 2 millions d’euros de retombées directes pour la seule économie locale (restauration, bars, hôtellerie, transport, commerces de proximité) (source : Var Matin, 2022)
  • Tournoi Maurice Revello : Lors de l’édition 2019, la mairie a recensé plus de 20 000 nuitées générées pour l’agglomération toulonnaise, soit une augmentation de 15 % des réservations lors de la compétition (source : OMT Toulon)
  • Tour de France 2023 : Bien que court, le passage du peloton a entraîné, selon France Info, des pics d’affluence avec une fréquentation hôtelière jusqu’à 95 % le soir de l’étape et des retombées économiques évaluées à près d’1,5 million d’euros sur le seul week-end

Effet domino : tout le monde en profite ?

Sur le papier, c’est l’ensemble du tissu économique qui bénéficie de la manne : du vendeur de sandwiches sur le port aux grands hôtels du centre-ville. S’y ajoutent les prestataires événementiels, les taxis, ou encore les loueurs de vélos. Les commerçants du centre estiment que la période des grands matches du RCT représente en moyenne une hausse de 30 à 40 % de leur chiffre d’affaires. Les fêtes autour du Tournoi Maurice Revello, avec ses supporters internationaux, gonflent la consommation, notamment dans les quartiers du Mourillon ou du Pont-du-Las.

Cependant, certains secteurs restent à la marge — notamment les zones périphériques ou les commerces non touristiques, moins concernés par l’afflux ponctuel.

Un atout pour le tourisme… mais un tourisme particulier

Les grands rendez-vous sportifs brassent un public à part : supporters, familles, médias internationaux, observateurs et, parfois, explorateurs d’un week-end. Leur profil tranche : ils privilégient les courts séjours, aiment vivre la ville, consomment sur place, mais ne sont pas là pour le farniente prolongé.

Touristes d’un soir, catalyseurs d’image

  • Origines : Les données de l’Office de Tourisme Toulonnais (2023) montrent que 43 % des spectateurs du RCT ne résident pas dans l’agglomération
  • Dépenses moyennes : Chaque visiteur d’un grand tournoi dépense en moyenne 140 € par jour (contre 86 € pour un touriste lambda en dehors des grands événements, selon l’INSEE)
  • L’effet “ville sous les projecteurs” : Les retransmissions télévisées des matches et tournois génèrent des retombées en visibilité, estimées à l’équivalent de 5 millions d’euros en “valeur publicitaire” pour Toulon lors de grands rendez-vous sportifs (source : Kantar Media 2022)

Côté hébergement, la demande explose : lors du Tournoi Maurice Revello, certains hôtels affichent complet un an à l’avance pour les délégations étrangères. Les locations saisonnières (Airbnb notamment) voient leurs prix grimper de 30 à 50 % lors des grands événements.

À qui profitent ces retombées touristiques ?

Au-delà des chiffres, ces événements dynamisent une myriade d’acteurs :

  • Hôteliers et restaurateurs du centre-ville
  • Commerces de bouche et bars, qui prolongent leurs horaires d’ouverture
  • Musées, balades en mer, visites guidées, qui surfent sur l’afflux
  • Structures d’accueil éphémères (fan zones, animations sur les places)

Mais cette manne reste fragile et inégale, dépendant fortement de la réussite des clubs locaux et du calendrier international.

Impact sur l’emploi et mise en avant de savoir-faire locaux

Si ces grands rendez-vous font tourner la machine économique, ils sont aussi des créateurs d’emplois – à condition de bien regarder les chiffres.

Des jobs… mais souvent précaires

  • 170 emplois saisonniers créés (en moyenne) lors des plus grands tournois organisés à Toulon (accueil, sécurité, restauration, logistique - source : Ville de Toulon, 2022)
  • Des emplois indirects dans l’événementiel, le nettoyage, le transport, la communication

Le revers : la majorité de ces emplois sont temporaires. C’est un effet “coup de fouet” bienvenu, mais qui ne structure pas durablement le marché du travail local.

Des vitrines pour les talents locaux

Ces rendez-vous sont aussi l’occasion pour les producteurs, traiteurs et artistes de la région de se mettre en avant. Marchés thématiques, food trucks varois, concerts et animations mettent en lumière le terroir et la créativité locale. L’organisation de certaines épreuves a donné naissance à des collaborations inédites avec les lycées hôteliers, les écoles de commerce et les start-ups varoises spécialisées dans les nouvelles technologies sportives.

Le revers de la médaille : congestion, inflation, nuisances

Tout n’est pas rose dans le sillage des grands tournois. Les commerçants installés hors des flux touristiques pointent la circulation saturée, une clientèle volatile “qui vient, consomme vite et repart”. Côté résidents, les commentaires sont mitigés : nuisances sonores, hausse ponctuelle du prix des logements, occupations des centres-villes parfois difficiles à vivre au quotidien.

Autre bémol, le risque d’effet bulle : une forte dépendance au succès sportif et à l’image renvoyée lors de débâcles (le spectre du “stade vide” hante tous les organisateurs). À ce titre, la mobilisation hors des grands week-ends reste le vrai défi pour pérenniser l’activité.

Quelles perspectives pour un modèle gagnant-gagnant ?

Toulon capitalise sur ses événements sportifs pour rayonner – encore faut-il transformer l’essai. Alors, comment amplifier l’impact positif tout en limitant les effets pervers ?

  • Diversifier l’offre : Développer des événements de taille intermédiaire hors haute saison, qui pourraient profiter également aux quartiers excentrés
  • Allonger la durée de séjour : Miser sur une offre “week-end sportif et découverte” avec packages incluant visites, gastronomie, patrimoine
  • Renforcer les synergies entre acteurs : Créer des passerelles durables entre clubs, structures sportives, hôteliers, commerçants, Office du Tourisme et associations locales
  • Investir dans la mobilité douce : Mieux anticiper l’accueil (transports publics, parkings relais, navettes), pour un équilibre entre afflux et confort de vie des riverains
  • Valoriser et former : Pérenniser les compétences entraînées par ces événements, et accompagner l’intégration de jeunes dans ces filières (événementiel, management sportif, communication)

La vraie force de Toulon, c’est ce brassage, cette capacité à transformer la passion du sport en moteur de dynamisme. Le défi ? Que le stade, l’estrade ou le quai du port ne soient pas qu’un temps fort isolé, mais le début d’une dynamique de territoire. Les JO 2024, qui verront la France exposée sous tous les projecteurs, offrent une occasion en or de renforcer ce modèle.

À suivre : sportive, festive… et ambitieuse

La vitalité des grands tournois sportifs offre à Toulon une formidable caisse de résonance. Certes, le modèle est perfectible, entre effets d’aubaine et nécessité de structurer l’offre tout au long de l’année. Mais voilà : ici, le sport est – et restera – un accélérateur, un accélérateur de rencontres, de projets, d’idées et… d’avenir. Reste à ne pas s’essouffler, à jouer collectif pour faire de Toulon, non seulement la ville qui accueille les événements, mais celle qui sait en faire un levier permanent. La balle (ovale ou ronde) est dans notre camp.

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