Stade Mayol : l’âme du rugby toulonnais décryptée

3 juillet 2025

cofstoulon.fr

Quand une ville entière respire par son stade

À Toulon, le rugby n’est jamais loin des conversations ou des passions. Mais si ce sport coule dans les veines varoises, c’est en grande partie grâce à son enceinte emblématique : le stade Mayol. Un nom qui claque comme un coup de sifflet dans la mémoire, et pas seulement chez les supporters. Comment un stade urbain, coincé entre le port et le centre-ville, s’est-il hissé au rang de symbole national et même international ? Plongée dans un lieu qui ne se raconte pas qu’en matchs ou en tribunes, mais en histoires, en frissons, en épopées.

Mayol, entre légende et modernité : une histoire à la toulonnaise

Construit en 1920 grâce au chanteur Félix Mayol, enfant du pays et bienfaiteur passionné, le stade porte un patronyme autant qu’une mission : offrir aux Toulonnais un écrin pour exalter leur ferveur. Félix Mayol, icône de la Belle Époque, achète le terrain à ses frais et offre ce stade au Rugby Club Toulonnais, qui n’était alors qu’un club parmi d’autres. Pari réussi : car cent ans plus tard, le Mayol est le cœur battant d’une ville. 1920-2020 : un siècle d’histoires. Rares sont les stades français à afficher une telle longévité ininterrompue à la même adresse (source : RCT).

  • Capacité actuelle portée à près de 18 200 places (source : FFR).
  • Plus de 250 000 spectateurs chaque saison (chiffres Top 14).
  • Une enclave au cœur de la ville, à moins de 500 mètres du port.

Au fil des époques, Mayol a vu évoluer son architecture, gagner en confort, mais n’a jamais renié sa vocation populaire. C’est cette mue sans rupture qui fait toute son identité : tradition et modernité, dos à dos mais pas antagonistes.

L’ambiance Mayol : plus qu’une simple ferveur, une expérience sensorielle

Ceux qui l’ont vécu le disent : il y a des stades intimidants, des stades chaleureux… et puis il y a Mayol. Ici, la proximité est radicale. Aucune piste d’athlétisme ne sépare les joueurs du public. Le rugissement des tribunes descend littéralement sur la pelouse. L’effet est presque vertigineux : pas de distance, mais une osmose. Des générations de joueurs adverses s’en souviennent !

  • Le Pilou-Pilou : Cri mythique, lancé par un supporter en chef, repris en chœur par tout le stade, il galvanise joueurs et public. Né dans les années 1940 (source : Var-Matin), c’est le chant de guerre toulonnais.
  • Des tribunes fusionnelles : la tribune Finale, la Delangre, ou la Lafontan sont des noms inscrits dans l’histoire du club.
  • Le stade le plus redouté par les adversaires selon plusieurs anciens joueurs (paroles recueillies dans L’Équipe).

Le rugby à Mayol, ce n’est pas que le jeu : c’est la ville, le port, la mer qui s’invitent. On entend parfois les sirènes ; les effluves de Pastis et de houblon s’entremêlent au parfum des embruns. À chaque match, la ville fête, débat, vit à l’heure du RCT.

Des exploits gravés dans le marbre : les grandes heures de Mayol

On ne peut parler d’un stade emblématique sans évoquer les moments de bravoure, ceux qui font frissonner l’histoire. Mayol est le théâtre de soirées légendaires :

  • Le triplé européen historique : 2013, 2014, 2015. Trois Coupes d’Europe consécutives (source : EPCR), une première dans le rugby moderne. Même si les finales étaient disputées ailleurs, c’est à Mayol que la communion avait lieu.
  • Les derbys face à Toulouse, Bordeaux ou Montpellier, toujours incandescents.
  • Le maintien héroïque de 2008 : dans une ambiance dantesque, Toulon sauve sa peau en Top 14, prélude au renouveau du club.
  • Le match inaugural contre le Racing, en 1920 : 3 000 personnes, déjà une grande fête populaire (RCT).
  • L’hommage à Jerry Collins en 2015, moment d’émotion qui a traversé le monde du rugby.

Chaque décennie sa fierté, chaque pavé de la pelouse son anecdote. Que ce soit la pluie battante ou le soleil écrasant, les supporters en rouge et noir font corps avec leur stade.

Mayol, carrefour social et culturel du centre-ville

Ce qui frappe à Mayol, ce n’est pas uniquement le jeu, mais l’intégration du stade dans le tissu urbain et social de Toulon. Rares sont les enceintes sportives françaises aussi “centrales” : on vient à pied, en bus ou en bateau, on prolonge la soirée sur le port, on discute rugby au marché du cours Lafayette. Le stade rayonne au-delà de ses murs et s’invite dans la vie quotidienne.

  • Écoles, associations et centres sociaux organisent régulièrement des visites, initiations au rugby, événements éducatifs dans l’enceinte.
  • Le stade accueille aussi des concerts, des festivals (Jazz à Toulon y a fait étape), créant des ponts entre sport et culture.
  • L’architecture urbaine s’est adaptée au stade : places, commerces et stationnements prévus pour canaliser le flux des supporters.

Mayol, c’est donc un lieu de rassemblement, mais aussi un acteur économique : les jours de match affichent une hausse de 15 à 20 % de la fréquentation dans les bars et restaurants voisins (source : Chambre de Commerce du Var, 2023). Le RCT, via ses fondations, s’implique régulièrement dans des opérations citoyennes et caritatives sur site.

L’identité toulonnaise : ce que Mayol dit de la ville

On dit du rugby à Toulon qu’il ne ressemble à aucun autre. C’est vrai parce qu’il est d’abord une affaire de caractère. Le stade Mayol concentre cette identité, fière et populaire, parfois rugueuse, toujours passionnée. Le “petit” stade par la taille, le “grand” stade par l’âme. Les couleurs rouge et noir, le pilou-pilou, les clameurs… mais aussi une certaine modestie, le refus de l’esbroufe.

  • À la différence de nombreux clubs, Toulon garde ses racines : quasiment impossible d’imaginer un “nouveau Mayol” en périphérie !
  • La localisation, unique en France, fait du RCT un club à part, forgé dans l’urbanité, le port, le brassage populaire.
  • La continuité générationnelle : on vient à Mayol de père en fils, de mère en fille. La tradition du match du dimanche après-midi perdure.

Un stade qui continue à écrire son histoire

Mayol n’est pas un musée, c’est un poumon vivant. En 2024, au fil des nécessaires rénovations, la question de sa modernisation et de ses capacités s’impose. L’agrandissement du stade est un sujet brûlant, oscillant entre le respect du patrimoine et les exigences financières du rugby professionnel. Un débat vif et typiquement toulonnais, où chacun veille à ce que la magie de Mayol, ce supplément d’âme, ne s’évapore jamais.

  • Projet de couverture de tribunes, nouvelle pelouse hybride, modernisation des accès : la municipalité et le RCT affirment leur volonté de préserver l’esprit du lieu tout en assurant son avenir (Var-Matin).
  • Le record d’affluence reste 18 200, mais le stade affiche régulièrement complet sur les grandes affiches de Top 14.
  • Mayol s’ouvre aussi à l’Europe : accueil de matches de Coupe d’Europe, essor du rugby féminin lors d’événements mixtes.

Le rugby à Toulon regarde l’avenir en s’appuyant sur un héritage unique. Plus qu’un outil, Mayol reste la matrice de l’esprit toulonnais, un marqueur identitaire qui fédère bien au-delà de l’aire de jeu.

Et demain ? Mayol, une flamme à entretenir

Chaque génération réinvente sa relation au stade : plus inclusif, plus ouvert aux femmes, aux familles, aux écoles, Mayol veut rester un bien commun. Plusieurs projets pédagogiques, expositions, et collaborations avec les universités de Toulon s’y déploient, visant à ouvrir l’univers du rugby à tous. Mais surtout, les soirs de match, la ferveur ne faiblit pas. Ce n’est pas qu’un monument de béton : c’est un catalyseur de passions, une agora moderne, le cœur qui rythme la ville rouge et noire.

Voilà pourquoi Mayol n’est pas un stade comme les autres, mais bien le symbole vivant d’un territoire qui n’a jamais renoncé à son identité. Rugby, fierté, convivialité… Rien ne s’invente, tout se vit, au fil des matches, dans les volutes de la clameur toulonnaise.

En savoir plus à ce sujet :